Rechercher dans ce blog

mercredi 20 février 2013

Justice distributive

La justice redistributive, en matière fiscale, consiste à  ce que chacun paie selon ses moyens, sa capacité contributive, dit-on : celui qui a plus doit payer plus (voire même proportionnellement plus) que celui qui a moins.

En dehors des pays, qui ont adopté une flat tax,  soit un impôt à taux unique sur les revenus, quel que soit leur montant, la plupart des pays connaissent un système d'impôt sur les revenus progressif par tranches. Dans ces systèmes, les tranches les plus élevées du revenu subissent un taux supérieur à celui applicable aux tranches les moins élevées. Dans les deux cas, l'impôt peut être de 0 % pour les revenus les moins élevés, comme s'il était indécent de réclamer des impôts à ceux qui ont à peine de quoi vivre. Il y a une certaine logique à cela : les précarisés de nos sociétés occidentales vivent souvent d'allocations sociales versées par l'Etat (chômage, assurance maladie invalidité, CPAS ...). Décider de taxer ce qu'on verse soi-même ne peut relever que d'un esprit un peu tordu. La progressivité participe d'un souci de redistribution animé par une certaine conception de la justice sociale. Il est amusant, à cet égard, de faire le relevé des pays qui appliquent une flat tax. En Europe, il s'agit de presque tous les pays de l'Est qui ont peu ou prou eu à voir avec le communisme ! Comme si l'idée qu'une justice distributive par l'impôt ne les avait pas encore atteint, alors que des énormes fortunes se créent à côté d'un large peuple vivant à la limite du seuil de pauvreté.

Un taux de 0 % ou presque rien pour les plus pauvres ... à peu près le même taux auquel sont effectivement soumises certaines grandes sociétés nationales ou multinationales, et certains rentiers qui vivent de plus-values boursières et ne connaissent aucun impôt sur la fortune (c'est le cas en Belgique). Etrange paradoxe que de traiter les plus pauvres et les plus riches de la même façon, à l'exception des autres.

En Amérique du Nord, le privilège des plus riches se traduirait par un sentiment philanthropique plus élevé. Aux Etats-Unis, quand on est très riche, on paie peu d'impôts, mais on subsidie davantage d'oeuvres philanthropiques. Tout au privé, le moins possible par l'Etat. Un choix évidemment discutable.

Etrange paradoxe aussi que cette TVA, dont le poids varie selon les pays, mais qui, sous réserve de taux différents pour les biens de première nécessité et les produits de luxe, met tout le monde sur le même pied. L'impôt le plus injuste qui soit. Le pain du pauvre et le pain du riche soumis au même taux.

Mettre tout le monde sur le même pied. Est-ce juste ? Est-ce équitable ? La justice distributive serait-elle uniquement une question fiscale ?

Deux sujets d'actualité témoignent du contraire. Ils suscitent l'un et l'autre la polémique.

Le ministre Nollet a suscité un beau tollé en proposant une nouvelle tarification pour les besoins en électricité. Le système actuel repose en effet sur deux piliers : des frais fixes identiques pour tous, imposés par les distributeurs et un tarif dégressif : plus on consomme, moins on paie. Le résultat est limpide : l'énergie coûte proportionnellement plus cher à ceux qui ont de faibles revenus et se voient contraints de limiter leur consommation qu'à ceux qui consomment sans regarder, que l'on peut supposer plus fortunés. N'est-ce pas un cas flagrant d'injustice, en même temps qu'une incitation à la consommation d'énergie chez ceux qui peuvent se le permettre ? La question mérite au moins d'être posée. En  proposant 500 kw/h gratuits pour tous et une tarification progressive au-delà, le ministre a suscité une levée de boucliers. Il n'est décidément pas simple de prôner la justice distributive !

Deuxième exemple, en France, cette fois, un vieux sujet rabâché : pourquoi ne pas taxer les allocations familiales ? L'Etat taxerait donc des sommes qu'il verse lui-même, donnant d'une main et reprenant de l'autre. La question qui se pose n'est-elle pas plutôt celle-ci ? Est-il juste, équitable, que les allocations familiales soient les mêmes pour un gosse de riche et pour un gosse de pauvre ? Ne devraient-elles pas dépendre des ressources dont disposent les parents ? Comme il existe un taux zéro pour la taxation des bas revenus, il devrait exister des allocations familiales dégressives et à taux zéro pour les plus fortunés. La Belgique cumule deux systèmes peu transparents : des allocations familiales (subside direct) et des réductions d'impôt pour enfants (subside indirect). Il serait temps de fusionner les deux systèmes. A une époque, aujourd'hui heureusement révolue, les réductions d'impôt, en Belgique, conduisaient en outre à accorder une subvention plus importante aux enfants de riches qu'aux enfants de pauvres.

Ces questions sont délicates à traiter.

Bien des choses devraient être mises à plat pour assurer une juste redistribution. Encore faut-il le vouloir.



Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.