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lundi 21 janvier 2013

Meubles oubliés


A l'hôpital, mon père dispose, quand il est au fauteuil, d'un repose-pieds. Le repose-pieds de mon père est sans grâce. Il est juste utilitaire. C'est peut-être en partie pour cela que je supporte mal le milieu hospitalier. Tout y est utilitaire et manque de grâce et de raffinement. Certes, tout est clean, nickel, même ; les infirmières sont gentilles, mais leur gentillesse est un peu forcée et souvent infantilisante.

En résumé, on n'est pas ici pour mettre le patient en état de grâce, mais pour le soigner. Mon père est hospitalisé à l'hôpital Saint Joseph et quand je vois, dans les couloirs, des photos anciennes des soeurs de Saint Charles Borromée qui ont créé cet hôpital, on se demande en effet, tant elle ressemblent à des cerbères, en quoi la grâce, dans le sens de "gracieux", les concernait.

Heureusement, mon père a craqué pour Rachida, une jeune infirmière d'origine marocaine, au sourire éclatant, aux très beaux cheveux noirs (comme ceux que ma mère avait quand ils se sont connus) ; elle ne traite pas mon père comme le ferait une cheftaine scoute, ni ne le prend pour un vieillard sénile.

Je me rappelle que nous avions à la maison un "passet" en bois rectangulaire, j'aimais m'asseoir sur le passet, quand j'étais petit enfant, c'était un meuble à ma mesure. Le passet est un repose-pieds. Comme repose-pieds, je le trouve, à la réflexion, fort inconfortable. Je l'imagine mieux comme ustensile pour la traite des vaches à la main, car il était assez pesant. 

Ma grand-mère maternelle avait mieux : un petit meuble où poser les pieds, mais qui balançait sur deux espèces de ski en bois de forme arrondie ! Elle appelait ce meuble sa "balancelle". Et, à côté de la balancelle, une peau de renne qu'elle avait ramenée du Cap Nord. J'adorais me coucher à côté de ma grand-mère sur la peau de renne, dont les poils étaient drus et doux. 

Out of the record ! J'ai failli écrire ceci : j'adorais me coucher sur la peau de renne, à côté de ma grand-mère, dont les poils étaient drus et doux ...

Ma troisième grand-mère, madame Velez, avait un fauteuil dit Voltaire, avec trois positions. J'aimais jouer avec les boutons pour la faire changer de position par surprise.

Et puis, il y avait aussi chez ma grand-mère un petit fauteuil en bois, une antiquité, paraît-il, trop fragile pour qu'on s'y asseye, et puis un drôle de siège - je ne sais pas ce qu'il est devenu - le fond était en paille, mais au lieu d'une chaise avec un dossier, il y avait deux dossiers à angle droit. On appelait ce siège le "ham". Mon grand-père s'en servait, m'a-t-on dit, dans son atelier de tailleur "sur mesure", où les riches venaient s'habiller.


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