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vendredi 28 décembre 2012

Nativité

Le pape Benoît a regretté, urbi et orbi, que la fête de Noël se passe dorénavant de Dieu.

Oui, en effet, Noël, l'anniversaire de Dieu qui vient parmi les hommes, n'est plus qu'une fête païenne, faite de sapins décorés, de cadeaux, de pères Noël barbus et de villages en bois au milieu des villes, où l'on mange, où l'on boit, où l'on achète et où l'on glisse sur des patinoires artificielles.

Rares sont ceux qui pensent encore à l'anniversaire commémoré en ce jour. Et, certains de mes amis mécréants qui refusent de céder à cette folie de consommation sont peut-être plus proches du mystère que d'autres.

Noël, faut-il le rappeler, est une fête chrétienne. Qu'elle ait lieu le 25 décembre, plutôt qu'à une autre date, est un détail à propos duquel on peut discourir.

Noël donne lieu, chez les chrétiens, à des célébrations et cérémonies ... qui ne sont pas toujours très chrétiennes. Il en est ainsi de la messe de minuit célébrée, dans la basilique Saint Pierre, à Rome, par le pape, avec les ors et les pompes propres au microcosme vatican.  Est-elle sincèrement plus chrétienne que la fête de Noël des non-croyants ? Contraint de regarder le calamiteux spectacle, proposé à la télévision, avec mes parents qu'il fallait entourer, je me suis mis à douter. Mon Noël à moi n'avait rien à voir avec cette mise en scène d'un vieillard, entouré d'autres vieillards, nommé par les mêmes vieillards ; rien à voir avec la mitre ridicule portée par ce "souverain pontife" (rien que cette appellation tellement païenne me fait frémir). Je laisse volontiers le pape Benoît à ses ors, ses dentelles et ses mules rouges, qu'il apprécie manifestement beaucoup. Ce pape, et le spectacle immuable qu'il nous offre, chaque année, ne représentent pas grand chose pour moi. Ils sont un contre-sens.

Pour remettre un peu de Dieu au coeur de tout ce non-sens, je vais essayer modestement d'expliquer ce que j'ai voulu célébrer comme chrétien, ce jour-là.

Premier aspect.

Entre l'homme et Dieu, il existe une frontière ténue. Je ne me suis jamais demandé si Dieu a créé l'homme ou si l'homme a créé Dieu ; mais j'aime à reconnaître, dans ma vie, un espace qui ne m'appartient pas tout à fait, et qui m'est pourtant infiniment proche. Il ne s'agit point alors de la place à réserver aux autres - ce qui est important -, mais d'être ouvert à une altérité " à un Autre", qui m'échappe et me surprend ; un Autre avec qui il m'arrive de perdre prise. C'est à cette expérience vécue que je pense, quand je pense à Dieu. Le Dieu auquel je crois n'est pas une abstraction, une idée, une projection. Il vit dans mon coeur. Il est une partie de moi-même, de ce que je vis et ressens.

Ceci est très important. Mon Dieu ne vit pas dans un panthéon, ou dans les cieux, ou dans quelque construction rationnelle. Il vit en moi et j'ai choisi de l'accepter comme tel.

Et si c'était cela l'Incarnation ? Dieu qui vit dans le coeur des hommes. Dieu qui n'est pas au ciel mais au coeur de l'aventure humaine, de mon aventure humaine. Fêter Noël, c'est fêter cela !

Cela veut dire deux choses :
- je ne suis pas tout ; je reconnais que je ne me suffis pas à moi-même, malgré mon intelligence, ma raison, mes talents, mes qualités et mes capacités ; je reconnais une faille et j'accepte que cette faille soit habitée par autre que moi ;
- cet autre que moi, vient à moi. Il n'attend pas de moi que je le rejoigne. C'est lui qui fait le premier pas et il attend que je l'accueille.

Noël, c'est Dieu qui vient, un autre Dieu, un Dieu qui quitte son rôle dans le ciel, qui ne sera plus un Dieu vengeur, un Dieu courroucé, quoique fidèle, mais un Dieu qui s'unit à l'humanité. Un Dieu qui décide de rompre la distance entre Lui et nous.

Deuxième aspect.

Noël, c'est la commémoration d'une naissance. Une naissance, c'est une vie nouvelle qui surgit. On se réjouit toujours quand la vie surgit. Si c'est le cas, on a bien raison de fêter Noël.

Mais de quelle naissance et de quelle vie s'agit-il ?

La tradition parle d'une étable, d'une mangeoire, de parents ne trouvant pas d'autre abri, d'anges chantant "Gloria in excelsis Deo", de bergers, de gens simples, d'un boeuf et d'un âne. Telle est la version de l'évangéliste Luc  (Lc, 2, 1-21), un récit qui ne relate évidemment en rien une réalité historique, mais qui a peut-être un sens au-delà de la mièvrerie véhiculée depuis lors.

De qui l'enfant, qui symbolise la proximité de Dieu avec l'homme, est-il entouré ? A part son père et sa mère, aucun membre de sa famille n'est présent. Il n'y a que des étrangers, des gens simples et ... des animaux (un boeuf, un âne et des moutons).

Cela nous indique peut-être les milieux où la vie de Dieu circule plus qu'ailleurs. Cela nous révèle peut-être aussi que la famille n'est pas que fondée sur les liens biologiques, mais sur une affection sans raison.

Ne nous trompons pas. Après les bergers, et les gens simples, il y aura les rois mages (Mt, 2, 1-12).  Ils incarnent le savoir et le pouvoir. Or, eux aussi, seront pris d'une affection sans raison. L'aventure n'est donc pas réservée à quelques-uns, que l'on pourrait appeler "les simples d'esprit".

Troisième aspect.

Le jour de Noël, la liturgie propose de lire le début de l'évangile de Jean. Ce fameux prologue : " Au commencement était le Verbe ... " (Jn, 1, 1-18).

Du Verbe à l'origine de la création de tout (Gn, 1 : " Dieu dit ...") au Verbe "qui se fait chair" (Jn, 1, 14), l'inlassable chemin de Dieu pour rejoindre l'homme n'est-t-il pas dit ?







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