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lundi 10 septembre 2012

Effata (ouvre-toi) : le corps et la foi

L'évangile de ce dernier dimanche (Mc, 7, 31-37) met Jésus en présence d'un éclopé de la vie particulier : d'abord, il est un étranger (il vient de la Décapole où Jésus s'est rendu dans son errance) ; ensuite, il est sourd et parle difficilement (on l'a appelé le sourd-muet). Double barrage : d'abord il est d'un autre pays, d'une autre culture, d'un pays où la voix des prophètes n'est jamais arrivée ; ensuite, il ne parvient pas à communiquer avec les autres. Or, privé de communication, il a fini par s'enfermer sur lui-même. Il n'est point de vie sans communication.

Jésus, ne va avoir aucun égard pour sa nationalité, sa différence, ses croyances, son passé. Ce n'est pas la première fois : avant lui, ou comme lui, il y a eu aussi la samaritaine (Jn, 4, 1-42), la syro-phénicienne (Mc, 7, 24-31), le centurion romain (Mt, 8, 5-13). Quant à nous, nous sommes tellement prompts à nous complaire de cénacles clos, si commodes pour pratiquer "l'entre-soi".  Jacques, dans l'épître du jour, ne dit pas autre chose (Jc, 2, 1-5). Il ne peut y avoir dans vos communautés de partialité, évoquant particulièrement les riches et les pauvres.

Il y a quelques jours, j'évoquais la parole et le toucher comme mode de guérison. Cette semaine, le processus est bien plus compliqué. Jésus lui met les doigts dans les oreilles, il prend de sa salive et la lui met sur la langue. Il lève les yeux au ciel et il soupire, avant de dire "Effata", "Ouvre-toi". Certains ont dit qu'il s'agissait là d'un rituel en vogue chez les guérisseurs de l'époque. C'est sans doute vrai.

Je retiens ceci : il ne s'agit plus seulement de parler et de toucher. Cette fois, tout est mis en oeuvre : la parole, le toucher, mais aussi les yeux, la salive et le souffle. A peu près tout ce qui constitue l'être humain, sauf le sexe. La guérison passe en tout cas, en l'espèce, par un corps à corps assez intime, qui ne me laisse pas sans un certain trouble. L'échange de la salive est souvent un tabou. En témoigne un film où le principal protagoniste, pourtant prêt à tout, disait : "J'embrasse pas" (un film d'André Téchiné, sorti en 1991).

Je songe à plusieurs choses.

Je pense à Thomas, le jumeau, enfermé avec les autres disciples au cénacle, après la mort de Jésus, tous enfermés par peur, et lui, doublement enfermé, puisqu'en plus l'incrédulité l'habite. Dans cet épisode encore, le corps à corps va jouer un rôle. Thomas sera délivré de sa peur et de son incrédulité, après avoir été invité par Jésus à mettre la main dans son côté (Jn, 20, 27).

Je pense aussi et surtout au rite de l'Eucharistie : "Prenez et mangez, ceci est mon corps ; prenez et buvez ceci est mon sang".

Ce que je dis ici est un balbutiement. Une interrogation sur le corps et la foi, le corps dans la foi, le corps et la guérison. Je n'affirme rien. Je laisse mon esprit et mon intelligence vagabonder, peut-être dans des chemins de traverse. Je pense néanmoins qu'un grand effort doit être fait pour rendre au corps sa juste place en religion, sous peine de trahir les écritures elles-mêmes.





















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