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jeudi 26 avril 2012

Romeo et Juliette

Moi qui ne suis vraiment pas assidu à la télévision, j'ai vu récemment un reportage rafraîchissant, et qui m'a fait beaucoup de bien.

Un groupe de lycéens de 16 à 18 ans a été suivi, pendant trois mois, à propos d'une expérience exceptionnelle : jouer, un seul soir, au prestigieux Théâtre de l'Odéon à Paris, Romeo et Juliette de W. Shakespeare. Comme souvent, dans le théâtre de Shakespeare, il fallait des comédiens, des musiciens/chanteurs et des danseurs.

http://www.programme-tv.net/news/tv/30630-romeo-et-juliette-version-moderne-france-2-video/

Aucun des participants à cette aventure n'avait jamais vécu cette expérience humaine exceptionnelle qui consiste à former, pour un temps, une troupe en vue de donner ensemble un spectacle.

Chacun est venu avec ce qu'il avait et ce qu'il était, certains avec un certain bagage, d'autres aucun. Comme souvent, ce sont les musiciens qui ont le plus d'expérience, ils travaillent leur instrument depuis plusieurs années déjà, mais restent souvent un peu appliqués. Les autres, les comédiens, les danseurs, n'ont parfois aucune expérience du tout.

Un trio d'adultes, que j'ai trouvé exceptionnels, encadrait ce projet né dans un lycée : le metteur en scène, le responsable de la musique, la chorégraphe. Exceptionnels pour amener ces jeunes à aller au-delà d'eux-mêmes. Bien entendu, ce n'était pas parfait. Bien entendu, on a déjà entendu meilleur Romeo et meilleure Juliette. Il faut toujours des esprits chagrins pour le déplorer, dans les commentaires à propos de cette émission, passant à côté de tout.

J'ai regardé ce reportage avec beaucoup d'émotion, ayant, pendant une bonne dizaine d'années, suscité, encouragé, soutenu un projet similaire avec des étudiants de ma Faculté, participé aussi comme comédien, puisque, chez nous, la troupe était faite d'étudiants, d'assistants et de professeurs volontaires.

J'ai vu, au cours de ce reportage, des jeunes éclore, des voix s'ouvrir, des tempéraments se révéler. Je me suis rappelé ces moments où le feu sacré n'était plus là, où les petits ego prenaient le pas sur le projet collectif, où la concentration était absente, où les amourettes des coulisses entraient en conflit avec l'amour à jouer sur scène.

Les propos et la pédagogie du metteur en scène du reportage ressemblaient, comme deux gouttes d'eau, à ceux de mes amis Michel D. et Marco P., nos deux metteurs en scène successifs. Moi, je jouais un rôle plus discret, dans les coulisses, pour encourager, pour appeler à la concentration, pour faire taire les bavardages.

Il fallait alors faire comprendre à ces jeunes, et moins jeunes, des choses comme celles-ci :

- si ton personnage dans la pièce est ridicule, ce n'est pas toi qui es ridicule ! Fonce ! Si le public rit, ce ne sera pas de toi, mais de ton personnage. N'ai-je pas joué, plus qu'à mon tour, les maris cocus et les puissants de pacotille ?
- la pièce ne commence pas quand tu entres sur scène et elle ne finit pas quand tu sors de scène : elle commence avant et elle se continue après : le temps d'entrer dans ton personnage et de le quitter, cela demande du temps ;
- quand, au cours du spectacle, tu sors de scène, définitivement ou pour y revenir, le spectacle continue, tu restes ton personnage, ce n'est pas le moment de papoter avec l'un ou avec l'autre de tout et de rien, ton personnage vit encore, a encore une vie pendant qu'on ne te voit pas, imagine-là pour habiter ton personnage encore mieux ;
- il n'y a rien de ridicule à formaliser, avant l'entrée en scène, dans une espèce de rituel, la cohésion de la troupe ; ce sont ceux qui le refusent qui finalement se montrent ridicules.

De cette aventure partagée avec des étudiants et des collègues, je garde peut-être les plus beaux souvenirs de ma carrière universitaire.

Bien entendu, j'ai aussi joué un rôle de comédien comme professeur. J'ai toujours tenté d'y concilier savoir et humour. Bref, je n'ai jamais été docte.

Dans le reportage que j'ai vu, il y avait aussi la jeunesse des intervenants. Ils avaient l'âge de Romeo et de Juliette. Il ne pouvait s'agir, les concernant, de rôles de composition. Cela était d'autant plus exigeant.
J'imagine fort bien le trouble des deux jeunes acteurs au moment de s'embrasser.

Je l'imagine d'autant mieux que mon mariage a trouvé peut-être son premier fondement dans un spectacle de fête scoute, où, avec Anne, nous étions Marie et Joseph ... sur la chanson de Georges Moustaki (Mon vieux Joseph). Nostalgie !

De quoi dépend une vie parfois  ...




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