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mercredi 8 février 2012

Les assistés et la fraude (fiscale et sociale)

J'écoutais distraitement, ce matin, les conversations de "café de commerce" de trois consommateurs : deux agents immobiliers et un démarcheur pour un plan de pension adapté aux indépendants, à moins que ce ne soit le contraire, des habitués du Randaxhe, le matin. Trois individus que je ressens aux antipodes de moi à tous égards. Ils dénonçaient, après avoir parlé de foot, tous ces gens qui, en Wallonie, ne travaillent pas et profitent du chômage ou vivent avec l'aide du C.P.A.S. Rien que des assistés ...alors que eux travaillent au moins 60 heures par semaine. Il était 9 h 45, et ils n'avaient pas l'air très pressés, quant à eux, de se rendre à leur premier rendez-vous de la journée. Aux clients qui leur téléphonaient, ils répondaient qu'ils allaient arriver.  Ils préféraient dénigrer tous les profiteurs (chômeurs, invalides, pensionnés, étrangers) et déploraient que tout se perd dans le quartier (bientôt il n'y aura plus que des commerces arabes). Pourtant en voilà qui travaillent, tiens, les arabes : leurs magasins sont même ouverts quand les autres sont fermés !

Ce qui m'a énervé évidemment, c'était le discours stigmatisant les assistés, qui ne sont pas tous loin de là des profiteurs. Je me suis demandé alors qui étaient, dans le fond, les assistés en Belgique.

Il y a bien entendu les pauvres hères (sdf, réfugiés, demandeurs d'asile, paumés en tous genres ...) qui, sans l'intervention d'associations ou d'initiatives privées, ne survivraient même pas. Celui qui s'est offusqué que le gouvernement ait pu trouver, en un week-end, des milliards pour sauver les banques, alors qu'il bafouille (cafouille) quand il doit donner, dans l'urgence du froid, un toit aux plus démunis, a été peut-être réducteur, mais il n'avait pas tort. Un article, ce matin, évoque le cas des mineurs non accompagnés issus de l'immigration (principalement maghrébine) qui, n'étant pas demandeurs d'asile, sont totalement laissés à eux-mêmes. Vivant dans la rue, ils tentent d'échapper à leur condition avec les pires moyens qui soient (drogue, petite délinquance), comme dans les favelas du Brésil. Le mythe de l'eldorado. La ministre de l'intégration et de la lutte contre la pauvreté devrait se sentir interpelée par ce phénomène, elle qui a assuré benoîtement que personne n'a dormi dans la rue, ces derniers jours, involontairement. Pourquoi ne pas coordonner un plan d'action avec l'exécutif des musulmans et les mosquées, puisque ces jeunes sont surtout originaires du Maghreb ? Il y a bien un réseau catholique d'institutions (dans l'enseignement, dans la santé, dans l'aide sociale), pourquoi pas un réseau musulman ?



http://www.lalibre.be/actu/belgique/article/718280/des-dizaines-d-ados-laisses-a-la-rue.html

Il y a aussi les jeunes en recherche d'un emploi, les licenciés par leur entreprise, les pré-pensionnés, les retraités, les invalides, etc. Généralement, ils ne se réjouissent pas de leur statut, ils le subissent plutôt. Est-il abusif de les aider ? Abusent-ils tous de leur situation ?

Mais il est bien d'autres assistés par l'Etat : les banques, les sociétés et les entreprises. On en parle moins. Pourtant, elles pèsent lourdement dans le budget de l'Etat.

On l'a vu avec les banques qui ne semblent pas se montrer en quoi que ce soit reconnaissantes du geste fait par la collectivité en leur faveur. Sauvées du naufrage, elles ont recommencé comme avant. Mêmes stratégies, même bonus.

Pour soutenir l'économie nationale, des mesures spectaculaires ont été prises pour soutenir les entreprises. Il apparaît ainsi que la plupart des grandes sociétés établies en Belgique ne paient pas d'impôt sur leurs bénéfices. On a évoqué le cas de Bekaert, mais aussi d'Arcelor Mittal. Quand je devais enseigner que le taux de l'impôt belge sur le bénéfice des sociétés est de 33,39 %, un des taux les plus élevés en Europe, il me fallait bien expliquer en même temps que cela ne voulait rien dire ... Cela peut juste servir d'argument à un homme politique de mauvaise foi.



http://www.lalibre.be/economie/actualite/article/717233/bekaert-zero-impot-en-cinq-ans.html
http://trends.levif.be/economie/actualite/politique-economique/magie-des-notionnels-arcelormittal-paie-500-euros-d-impot/article-1194827011342.htm

Il y a donc d'autres assistés que ceux que l'on montre généralement du doigt. Sont-ils comparables ? Les seconds n'ont-ils pas une responsabilité plus grande que les premiers ? Les premiers subissent en effet souvent la décision des seconds et ont un certain mal à comprendre quand l'Etat aide les plus fortunés tout en rognant sur l'aide offerte aux moins favorisés ou aux plus précaires.

On serait plus convaincu si les aides servaient à créer de l'emploi, à investir .. et non à enrichir des actionnaires.

Je terminerai par une réflexion qui a été faite par un ancien étudiant : il relevait, dans la presse, une lutte plus efficace contre la fraude sociale et s'exprimait plus ou moins comme ceci : "enfin, on reconnaît qu'il y a une fraude sociale et pas seulement une fraude fiscale, la fraude fiscale étant toujours associée aux indépendants". Je n'aborderai pas ici la fraude fiscale imputable aux indépendants, qui est réelle.



http://www.lalibre.be/actu/belgique/article/718002/chomage-la-lutte-anti-fraude-est-un-succes.html

Parlons de la fraude sociale. De quoi s'agit-il avant tout? De travailleurs, parfois sans papiers, engagés en noir par un indépendant, de travailleurs engagés par une entreprise sous un statut de "faux indépendant" ou de "faux intérimaire", de chômeurs qui complètent leur allocation par des petits travaux non déclarés. Je constate, dans tous les cas de figure, qu'il y a toujours un indépendant non déclaré ou un indépendant instigateur (complice) ...

A cet ancien étudiant, qui aime défendre les indépendants (et il y a en de très méritants), j'aimerais simplement faire remarquer que les choses sont plus nuancées que ce qu'il dit. Si tous les indépendants ne fraudent pas le fisc, tous les travailleurs et allocataires sociaux ne fraudent pas non plus la sécurité sociale. Et, quand ils le font, c'est, dans un nombre de cas non négligeable, parce qu'un indépendant ne leur donne pas d'autre choix, pour s'en sortir
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