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vendredi 7 octobre 2011

Bilinguisme

Le président de la NVA, Bart de Wever, a tenu, sur "Radio een", des propos musclés à propos de l'accord intervenu quant au sort de l'arrondissement BHV (Bruxelles-Hal-Vilvorde) sur le plan judiciaire. Voici comment la presse flamande les relate :
Franstaligen die geen Nederlands willen leren, worden beloond, in tegenstelling tot de Vlamingen die wel moeite doen om Frans te leren." Dat is voor NVA-voorzitter Bart De Wever de conclusie van het akkoord over het gerechtelijke arrondissement BHV.
Net zoals partijgenoot Ben Weyts vindt hij dat er voor burgerlijke zaken faciliteiten worden ingevoerd in heel België. Dat het detacheren van Franstalige magistraten naar het Nederlandstalige parket van Halle-Vilvoorde de efficiënte ten goede komt, is voor De Wever geen argument. Dan kunnen er ook Turkse magistraten naar Gent of Marokkaanse magistraten naar Borgerhout gestuurd worden, luidde het op Radio 1. "
Dans un pays qui comporte trois langues nationales, les belges usant de l'une ou l'autre de ces trois langues nationales devraient pouvoir être jugés, partout dans le pays, dans chacune de ces trois langues. Parler de magistrats turcs ou marocains à Anvers est vraiment déplacé. Ce que BdW ne peut accepter, c'est que des magistrats francophones puissent être habilités à rendre la justice sur une petite partie du territoire de la Flandre où les francophones sont majoritaires ou pas loin de l'être. Il oublie, ce faisant, que le français est une langue nationale, ce qui n'est pas le cas du turc ou de l'arabe marocain. On retiendra surtout que le belge francophone est, pour cet excellent homme, un étranger sur le territoire belge flamand.  Il faudra bientôt un visa pour se rendre de Waremme à Leuven ! Sans compter que l'on pourrait être renvoyé en bus ou en train de la SNCB vers son pays d'origine ...


Ce monsieur, soutenu par à peine 33 % des flamands, ce qui indique quand même que les deux tiers de la Flandre ne pensent pas comme lui, défend, lui et ses sbires, un territoire flamand fondé sur la langue flamande. Il faut dire qu'un autre parti flamand, le CD&V girouette et en dérive, ne sait trop dans quel camp se situer. Si cela n'était pas le cas, on n'aurait pas passé encore une fois des heures et des heures de négociations à propos de BHV, cet arrondissement entre-deux eaux.


Ce qui est rassurant, d'une certaine façon, c'est de voir le compromis intervenu sur  BHV entre les négociateurs critiqué aussi bien par la NVA que par le FDF : il doit s'agir d'un vrai compromis, vu que seuls les radicaux et les extrémistes ne s'y reconnaissent pas. Il y a lieu de rester vigilant cependant, car le CD&V ne lit jamais les accords conclus comme les autres partis. Ils doivent avoir, au CD&V, un problème avec la sémantique, la linguistique, la langue. Peut-être le flamand est-il une langue tellement originale qu'elle ne permet aucun compromis ? Je ne suis pas loin de le croire. Les flamands comprennent toujours autrement que les francophones les accords obtenus de longue lutte. Pourquoi ? Parce que le français est une langue plus nuancée que le néerlandais. Ce n'est pas pour rien qu'elle est la première langue de la diplomatie. Le flamand n'a qu'un mot quand le francophone en a au moins trois. C'est avec réticence que je le dis, mais, si cela peut faciliter les choses : négociez en anglais ! 


L'originalité de la langue flamande est merveilleusement résumée dans l'article de presse consacré à Bart de Wever, que j'ai cité.
On y découvre que :
  1. - "conclusion" se dit "conclusie"
  2. - "accord" se dit "akkoord"
  3. - "arrondissement" se dit "arrondissement"
  4. - "facilités" se dit "faciliteiten"
  5. - "magistrats" se dit "magistraten"
  6. - "parquet" se dit "parket"
  7. - "argument" se dit "argument"
  8. - "radio" se dit "radio"
  9. - "le détachement" se dit "het detacheren".
La langue flamande manquerait-elle donc d'imagination, au point d'emprunter au français de si nombreux mots en les flamandisant un petit peu ? Car, "asperge" se dit, en flamand, "asperge" ; "arrangement" se dit "arrangement" ; "domination" se dit "dominatie", "délicat se dit "délicaat", "parlement" se dit "parlement", "réparateur" se dit "réparateur", "négociation" se dit "negociatie" etc. (enz.)

On comprend mieux pourquoi les flamands peuvent apprendre le français sans trop d'effort. En fait, ils apprennent le français en apprenant le flamand. La langue flamande ressemble à un sabir.



Selon Wikipedia, les sabirs "ont un lexique sommaire, limité aux besoins des locuteurs, et une syntaxe simplifiée par rapport aux langues d'emprunt". Ainsi, les maraîchers ou les horticulteurs de Tongeren et de Sint-Truiden, parlent un sabir sur le marché dominical de la Batte. Avec eux, je puis parler en sabir, mais pas en néerlandais. Ils ne me comprendraient pas. Tout à coup, je nourris une inquiétude : les négociateurs gouvernementaux parlent-ils entre eux un sabir ?


En Wallonie, à l'école, on apprend le néerlandais (Algemeen Beschaafd Nederlands) qui n'est pas exactement la langue que parlent les flamands de Belgique (je le précise, car il ne faut pas oublier qu'il y a, en France comme en Belgique, des flamands qui parlent le français). Comment faire ? Il faudrait en effet choisir entre le flamand d'Antwerpen, celui de Kortrijk ou celui du Limburg. Ceci est la cause d'un grand handicap pour les francophones. Pour parler en flamand à un flamand, le francophone doit le plus souvent oublier tout ce qu'il a appris à l'école et s'aventurer dans des phrases aléatoires avec autant de mots français que de mots flamands. Pourquoi dire "overeenkomst" quand on peut dire "akkoord" ? Pourquoi parler d'un "Eerste Minister", quand on peut dire le "Premier" ? Par exemple. Parler un néerlandais correct vous fait vite passer, aux yeux d'un flamand, pour une espèce de pète-sec. Les flamands convaincus n'aiment ni les francophones, ni ceux qui parlent mieux qu'eux le néerlandais. 

Ceci dit,  on ne peut que s'interroger sur les revendications flamandes réclamant une homogénéité territoriale fondée sur la langue flamande. La Flandre de Belgique n'existe pas en tant qu'entité linguistiquement pure et homogène, n'en déplaise à mes amis flamands.



A titre de comparaison, une communauté germanophone de 65.000 personnes vit sur le territoire de la Région wallonne, avec des droits qu'aucune minorité au monde n'a jamais obtenu. Jamais aucun wallon ne s'en est offusqué. Pourquoi les flamands ne peuvent-ils accepter, ne fût-ce qu'un qu'un dixième de ce statut, pour les francophones présents sur leur sol, alors que leur nombre dépasse largement celui des germanophones ? 



Finalement, où parle-t-on le néerlandais ?
Aux Pays-Bas, mais on y parle aussi le frison et le platt-deutsch.
En Belgique, sous diverses formes, et sous une forme plus civilisée empruntée aux Pays-Bas, dans une zone territoriale mal définie et fluctuante, où l'on parle aussi (et parfois majoritairement) le français (autour de Bruxelles et à la Côte belge), comme on parle aussi d'abord le français en Flandre française (à Lille, par exemple).
En France, dans l'extrême Nord, sous une forme patoisante déclinante, du côté de Duinkerke.
En Afrique du Sud, sous une forme batardisée (l'Afrikaans), jadis liée à un système d'apartheid.


Je stigmatisais tout à l'heure la pauvreté du vocabulaire flamand, qui n'existe que par ses emprunts au français. Voici un exercice instructif de linguistique comparée :


* Français : Le garçon caressait la fille autour du menton et l'embrassait sur les joues
* Allemand :  Der  Junge streichelete das Mädchen ums Kinn und küsste sie auf die Wangen
* Néerlandais :  De jongen streelde het meisje rond hart kin en kyste haar op haar wangen
* Frison occidental : De joôn streek ut moidje om de kin en smokte heur op de range
* Bas saxon : De Jung stratke dat Wicht ümt't Kinn to un tuujede hör up de Wangen
* Anglais : The boy stroked the girl round her chin and kissed on her cheeks
* Flamand occidental : Den joungen aaide/looide 't meesje/meisje round (h)euren/n(heuren) kin en kuste/poende (h)eur/n(h)sur op (h)/n(h)eure kaaken


Une certaine cohérence existe dans les premières propositions, jusqu'à l'anglais où l'on trouve encore quelques éléments communs. Une fois arrivé au flamand occidental, il faut chercher un peu plus.


On comprend mieux pourquoi des flamands de Belgique peuvent dire, en langue imaginaire :
"Een garçon aaide een meisje rond het menton en kusje heur op hare  kikken".


Et à Bruxelles (j'invente) : 
"Un  zivereir a strouchelé une jonge mèsje tout autour de son menton et lui a donné, une fois, des kuss sur ses bannetjtes. Viva boma, patates met saucisses".











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