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mercredi 6 juillet 2011

Le cinéma dans la tête

La soirée, hier, était douce. J'avais envie de me promener au bord du fleuve en écoutant de la musique.

J'ai d'abord pris un bon quart d'heure à retourner tout l'appartement pour retrouver mes écouteurs. Bien entendu, Sam les avait empruntés, sans me le dire. Il considère, depuis toujours, que ce qui est à moi est à lui et ne comprend pas, quand je le lui dis, que ce n'est pas le cas.

Comme il n'a pas manqué de me le faire remarquer, lorsque je suis rentré, "si tu avais eu tes écouteurs, tu n'aurais peut-être pas pu faire une rencontre".

Je n'étais pas sorti pour faire une rencontre. Je voulais profiter agréablement de la fraîcheur du soir.

Les bancs publics sur le quai étaient déjà bien occupés. Par  rapport à l'année dernière, beaucoup moins de maghrébins et de plus en plus d'africains noirs. Les maghrébins de mon quai ont généralement le mérite de  bien se tenir. Je ne puis en dire autant malheureusement de leurs collègues africains plus au sud: ils boivent, ils sont entourés de filles plus provocantes les unes que les autres, ils sont bruyants et souvent cela dégénère en dispute, voire en rixe. Il faut alors appeler la police.

Depuis que je suis soupçonné de draguer les arabes, quand je me promène au bas de chez moi, je ne sais plus quelle attitude prendre pour avoir l'air le plus indifférent possible. J'ai quand même bien droit à la douceur du soir sur le quai en bas de chez moi!

Il restait une place sur un banc occupé par un jeune arabe "bien comme il faut". Je le trouvais beau, mais je ne savais pas, à ce moment précis, à quel point il était beau. Le contact s'est noué après un passage tonitruant à moto de quelques jeunes femmes de l'autre groupe. Il me dit alors: "qu'est-ce qu'elles veulent? qu'est-ce qu'ils cherchent? Il me dit aussi: "ils se perdent".

C'est lui qui m'a sorti de mon isolement voulu. Nous avons parlé pendant des heures, sur un banc, en dessous de chez moi. Sam est rentré vers minuit, en faisant attention à ne pas me réveiller, alors que j'étais toujours là, sur le quai, à parler avec Mohamed ... et je suis rentré à deux heures du matin!

Il m'a beaucoup parlé de sa vie, des droits de l'homme, de Mohamed VI et nous avons beaucoup parlé de religion aussi pendant plus de quatre heures. Il voulait me dresser le portrait du bon, du vrai, musulman.

Mohamed est beau physiquement, comme on peut l'être encore à 28 ans, mais plus encore par son âme.

Nous avons parlé - c'est lui qui l'a voulu - de la prière, des obligations liées à la religion, de l'amour du prochain, du pardon, du partage avec les plus pauvres, de la peur de Dieu et de l'amour de Dieu, de l'importance de faire au moins une fois dans sa vie un pélerinage, de la sexualité aussi. Tous ces sujets nous rendaient très proches l'un de l'autre, car il y avait peu de différences entre nous. Je n'irai pas jusqu'à dire que ce garçon est un saint, mais je puis dire sans hésiter qu'il est sain.

A certains moments, je me retrouvais projeté en arrière du temps de Az. A d'autres, j'étais merveilleusement heureux de  cette nouvelle rencontre. Il chassait les insectes importuns que ma chemise blanche attirait. Nos poignées de mains témoignaient d'une connivence. Nous nous sommes quittés l'un et l'autre heureux, en laissant ouverte la possibilité d'une autre rencontre.

Bien entendu, ce n'est pas négligeable, il souhaite se marier et avoir des enfants.

J'ai très envie de le revoir sur le banc en dessous de chez moi et je suis sûr que, ce soir, j'irai voir s'il est là.

Qu'est-ce qu'on peut se faire du cinéma, dans la tête, à mon âge!

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