Rechercher dans ce blog

lundi 25 octobre 2010

Le rêve du Vieux

Quelques lignes d'un livre que j'ai ouvert avec réticence. Ces lignes pourtant me paraissent belles, vraies et d'une grande profondeur.

Le Vieux dit:

Est-ce que j'existe? Dans la tête et le coeur d'une foule innombrable, oui, sans le moindre doute. Jamais rêve de gloire ou d'amour n'a occupé les esprits avec tant de force et de constance que la folie de Dieu. Sous les noms les plus divers, sous les formes les plus invraisemblables, il y a quelque chose qui court de génération en génération: c'est moi. Que feraient les hommes s'ils ne me cherchaient pas? Ils me cherchent - et ils ne me trouvent pas. S'ils me trouvaient, ils ne penseraient plus à moi. Parce qu'ils me cherchent sans me trouver, parce qu'ils me nient, parce qu'ils m'espèrent, la seule pensée de Dieu ne cesse jamais de les occuper tout entiers. Je suis un Dieu caché. Dieu vit à jamais parce que les hommes doutent de lui.


Jean d'Ormesson, C'est une chose étrange à la fin que le monde, Robert Laffont, Paris, 2010, p. 79.



Le Vieux, celui qui réfléchit avec ces mots-là, a trouvé dans l'auteur un porte-voix, mais il n'est pas l'auteur. A-t-il inspiré l'auteur? L'auteur s'est-il pris pour lui?

Je le précise: en intitulant cette rubrique "Le rêve du Vieux", je ne pensais pas à l'auteur. Il est, à certains égards, plus jeune que certains jeunes et moins vieux que certains jeunes.

Je craignais un ouvrage à l'image de l'auteur dans les débats télévisés: brillant, bavard, coquin, quand il le faut; un bel esprit capable de donner un peu de piment à un dîner mondain.

Ce n'est pas du tout le cas. Ce livre est à la fois dense, simple, et lumineux.

Je me demande même s'il ne pourrait pas constituer le fil conducteur d'un enseignement "global" à inscrire obligatoirement au programme de nos lycéens de dernière année. Se confronter à l'histoire des idées, des sciences, des religions, de la littérature, dans une langue irréprochable. Peut-on imaginer meilleur exercice?

Pour délivrer pareil enseignement, il faut avoir atteint un certain âge et considérer les mondanités pour ce qu'elles sont, c'est-à-dire peu de choses.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.