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mercredi 25 août 2010

Les deux hommes

Je ne résiste pas au désir de vous partager in extenso le texte suivant. Prenez-le temps de le lire.

Le pape Paul VI et le patriarche de  Constantinople Athénagoras se sont rencontrés, et trouvés, en 1965, à Jérusalem. J'avais dix ans et je me rappelle des photos de cette rencontre  dans Paris Match.









Olivier Clément, un théologien orthodoxe, aujourd'hui disparu ("qui a rejoint son éternité", comme dirait Jean-Yves Leloup) a décrit cette rencontre en des termes tellement beaux et tellement justes que je veux les partager:

"Regardons ... chacun de ces deux hommes. Le visage du pape est finement ciselé, rasé, délimité avec rigueur. Il est tissé de volonté, d'intelligence, d'une lucide conscience. Visage diurne, qui a rejeté la nuit, lutte contre elle - elle s'attarde pourtant dans la densité de la bouche -, et porte témoignage de la profondeur par l'extrême clarté des yeux. Cet homme se sait et se veut au service de Dieu. Mais il doit le savoir et le vouloir, et cela ne va pas sans combat.


Le visage du patriarche a quelque chose non pas d'indécis mais d'illimité, dont témoigne la barbe purifiée par la blancheur, les longs cheveux discrètement noués. Ce visage ne s'oppose, ni ne s'exalte, il rayonne. Le jour et la nuit s'y harmonisent. A la barbe lumineuse (qui fut très noire) correspondent les grands yeux nocturnes, pourtant secrètement illuminés. On devine que cet homme n'a pas à vouloir (ou plutôt à vouloir la volonté, comme le fait sans cesse l'Occident) - il lui suffit d'être. En lui le conscient et l'inconscient communiquent, l' "image" unifiante émerge, l'homme est visité de songes, spontanément proche des enfants, des bêtes, des plantes, de la vie immense et lente qu'il exprime dans l'adoration et qui le porte ...


Le pape symbolise l'intelligence et la volonté de l'Occident.


Le patriarche symbolise la sagesse ontologique de l'Orient.


Le second sent et, par là même, pense toujours par intégrations.


Le premier est le moi, vigilant, structuré, formé par une culture humaniste aux fortes disciplines; il se tend vers Dieu dans une tension pathétique qui fouette sa conscience et sa volonté.


Le second est le Soi, longtemps fluctuant et menacé d'ambivalence, mais qui, une fois "centré", permet à la lumière de Dieu de pénétrer les profondeurs de la vie, du cosmos. Non pas tendu vers Dieu, mais paisiblement saturé de sa présence ...


L'un ne peut aller sans l'autre".


J'ai plutôt été éduqué selon le modèle qu'incarne Paul VI, alors que mon être profond se retrouve dans ce qui est dit du patriarche Athénagoras. C'est clair: je suis plus oriental qu'occidental. Je le vérifie tous les jours.

Mais ce texte, qui me bouleverse, met aussi en perspective tant de choses qui n'ont rien à voir avec la religion, la foi ... Une manière d'être.

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