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jeudi 16 juillet 2009

16 juillet 2009

Ce 16 juillet est une journée faste, mais néanmoins un peu grise.

D'abord, Sam a réussi toutes les épreuves de sa formation.

Il a annoncé qu'il fêterait sa victoire, avec des amis, dans le Carré ... normal. Il aurait pu téléphoner à mes parents. Je suis triste pour Pami et Mami, qui ont collaboré, plus que nous tous, à ce projet, ces derniers mois, puisqu'ils l'ont hébergé. Au lieu de lui reprocher l'une ou l'autre rentrée tardive, mon vieux père s'est levé tous les jours à 6 heures du matin pour être sûr que Sam parte à l'heure. Mais Anne va bientôt partir en vacances et la maison de Bois-de-Breux sera alors fermée pour quelques semaines.

Ben a le talent du bonheur. Il le partage. Il sait dire merci. Il est reconnaissant. Il aime partager sa joie insouciante.

Il a pris l'initiative d'un repas dans une auberge/taverne/brasserie à la campagne, avec mes parents: splendide terrasse et très beau jardin, avec une mare, des nénuphars, des iris, des grenouilles et des tortues. Et surtout exceptionnels moments de complicité entre Ben et moi pour déceler le ridicule ou l'incongruité de certaines situations ou de certains personnages.

Mon père ne goûte plus ces moments comme il faudrait. Des idées noires le torturent sans arrêt. Depuis, en fait, qu'il s'est mis à lire ... "Femmes d'aujourd'hui", le journal qui a conduit, selon lui, ma mère "dans le féminisme" (!) et qui n'a de cesse que de détruire les couples!

Au retour, nous sommes passés à l'Abbaye de Brialmont, toute proche: je voulais acheter des oeufs frais (je veux dire juste sortis du cul de la poule), du fromage d'Orval (mon crémier est en vacances) et je voulais surtout une huile ou un baume de massage relaxant. J'ai tout trouvé. Des oeufs de Brialmont, du fromage D'orval et un baume pour massage des moines de Ganagobie. Il n'y a pas à dire: ils savent ce qui est bon pour nous.

L'abbaye de Brialmont, c'est juste au dessus de Tilff et de la vallée de l'Ourthe, à 15 minutes de Liège.

http://www.brialmont.be/

En prime, j'ai acquis un superbe livre illustré sur l'abbaye d'Orval (Joseph Orban, Jean-Marie Lecomte, Abbaye d'Orval, Editions Noires terres/ Weyrich, 2007).

Ce livre peut-il être mis entre toutes les mains? Peut-être tout le monde n'est-il pas prêt à le recevoir de la même manière. Le livre est surtout fait de très belles photos.

Il s'y trouve quatre choses, qui me frappent avant tout:

- il s'agit d'abord d'hommes et, au fil de l'histoire, d'un peu de l'histoire des hommes;

- il s'agit d'un lieu qui ne serait pas ce qu'il est sans la nature, le ciel, les arbres, l'étang, les colombes, l'eau, la forêt;

- il s'agit d'un lieu où l'homme a construit. Il n'a pas construit n'importe comment. A Orval, plus qu'ailleurs, et bien que les derniers bâtiments soient de facture récente (1926), l'architecture, inspirée de la tradition, se veut sans cesse passage, perspective, ouverture, carrefour. Il suffit d'un éclairage différent, d'une saison différente, d'une heure différente de la journée ... et tout est différent. Tout est offert à la condition de l'accueillir. Je crois beaucoup à la vertu symbolique d'un lieu de vie qui réserve des lieux clos et des lieux ouverts, des chemins qui s'ouvrent, se croisent ou se séparent; des lieux où on se rassemble et des lieux où on s'isole. Un jardin de plantes, un jardin de fleurs, un jardin de pierre, un jardin d'arbres.

Un vieux moine d'Orval m'avait dit (j'étais étudiant alors): je suis entré ici à 18 ans; je n'en suis plus sorti, mais, tous les jours, j'ai voyagé. J'ai voyagé beaucoup. Il ne parlait bien sûr pas de géographie; il me disait que la découverte, c'est-à-dire la connaissance de ce qu'on ne connaît pas encore, peut se faire "sur place". Il ajoutait néanmoins toujours: "après (nous avions alors travaillé tout l'après-midi dans les bois), on boit une Orval. Ca n'a jamais fait de mal à personne. Regarde-moi, j'ai 78 ans ... je suis toujours garde-chasse et on vient d'abattre quelques arbres ensemble!". Et bien quelle santé ... en étant debout tous les jours à 3h45 du matin!

J'ai connu des moines plus jeunes. Ils n'avaient pas toujours le même enracinement. Yves n'a plus jamais donné de ses nouvelles. Ils ne sont plus très nombreux, là-bas à Orval, mais je sais qu'Yves est toujours là, trente ans après. J'aimerais qu'il ne m'ait pas oublié. A-t-il toujours dans son psautier ma prière d'un jour que je lui avais demandé de porter chaque jour? Yves a introduit la poésie dans ma foi. Et il m'a accordé un grand privilège: il m'a conduit au coeur du monastère. Un endroit de l'Eglise, un peu excentré, où il n'est pas rare de voir un moine seul en prière. Il m'a expliqué que les monastères construits selon les plus anciennes traditions comportent tous ce lieu. Je ne pouvais pas tout comprendre, mais, à cet endroit-là, j'ai été pris d'une très grande émotion. Il a eu la délicatesse de m'y laisser seul. J'ai eu l'impression viscérale d'être dans une autre dimension. Toutes mes barrières, toutes mes révoltes, toutes mes hontes, toutes mes objections rationnelles fondaient. Je me sentais nu et apaisé en même temps. J'étais.

- à Orval, il y a une âme. Quand j'ai visité l'abbaye de Fontenay, en Bourgogne, il n'y avait plus d'âme ... Et pour cause, les bâtiments avaient été rachetés par une des plus grandes banques françaises. C'était devenu un bâtiment historique, un lieu de concerts et un cadre d'exception pour des manifestations de prestige. Dans l'église même, il était impossible d'entendre seulement trois notes du Salve Regina. J'ai donc osé ... un guide m'a prié de me taire. Normal dans un monastère. Mais paradoxal. Pendant ce temps, des ouvriers montaient en criant et sifflotant un échafaudage pour un concert le soir, sans respect aucun pour la sacralité du lieu.

Fontenay

Mon père n'a jamais voulu descendre de la voiture. Il a les bonnes soeurs en horreur. Ma mère a acheté une eau de lavande; elle en a aspergé tout le monde sur le trajet du retour, ayant perdu le bouchon du flacon … et les chaos de la route aidant. Ben et moi, cela nous faisait rire. Mon père sermonnait ma mère. Depuis, je sens bon la lavande.

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